Quand faut-il rompre avec la “tradition orale” ?

Par Sud Ariarajah

Si vous avez travaillé dans des start-up ou d’autres petites structures, vous avez probablement constaté que le mode de communication le plus souvent utilisé pour transmettre des informations aux nouveaux arrivants est celui que l’on pourrait qualifier de « tradition orale » ou communication orale.

En général, la communication reste informelle dans les petites organisations. Les informations sont principalement transmises de bouche à oreille et ne sont pas écrites. Toutefois, cette situation ne doit pas surprendre. Le travail en petite équipe rend ce mode de communication plus logique ; cela ne sert à rien de rédiger de longues procédures quand on crée une start-up, car on se concentre principalement sur la stratégie, le développement des affaires et la mise en place d’un dispositif opérationnel élémentaire destiné à permettre la réalisation de toutes vos activités.

La croissance de l’organisation s’accompagne d’une augmentation du nombre de nouveaux arrivants, et des problèmes surgissent à terme lorsqu’il n’y a pas de temps à consacrer à ces derniers ou à leur formation. Comme les connaissances sont transmises d’une personne à l’autre par des « communications en chaîne » ou par « voie officieuse », l’information se transforme au cours du processus et les gens commencent à faire preuve de créativité et à interpréter ce qui leur a été transmis. Si le résultat peut être hilarant lorsqu’on joue au jeu du « téléphone », dans les organisations, il crée des problèmes pour son fonctionnement interne.

Il est important de comprendre pourquoi nous faisons les choses et comment nous devrions les faire. Si les explications ne sont pas fournies et que la documentation n’est pas disponible, les gens commencent à faire des suppositions et les choses peuvent devenir un peu chaotiques.

Vous savez que votre organisation peut avoir besoin de s’éloigner de la tradition orale lorsque, par exemple 

  • vous obtenez des réponses contradictoires, peu claires ou inexistantes à une question simple sur les processus internes, après avoir appelé plusieurs personnes de votre équipe ;

  • tout le monde semble frustré de ne pas savoir comment fonctionne la procédure et personne ne se donne la peine de se renseigner davantage, car cela prendrait trop de temps et d’énergie ;

  • les individus commencent à être créatifs et à gérer les choses d’une certaine manière, bien que cela ne soit pas recommandé, car ils ne savent pas comment faire autrement ;

  • un collègue est absent et tous les autres semblent ne pas savoir quel travail il faut faire.

Si la tradition orale est bonne lorsqu’une organisation est de taille raisonnable, dès que de nouvelles personnes rejoignent l’organisation, les choses commencent à déraper, car les informations ne sont pas transmises assez vite ni de la bonne manière. Les subtilités et les détails se perdent. L’organisation peut se développer, mais pas les personnes.

Une fois qu’une organisation a atteint un certain nombre d’employés et qu’elle est classée dans la catégorie des moyennes et grandes organisations, elle doit s’éloigner de la tradition orale et s’assurer qu’elle a documenté ses principales procédures. Cela peut sembler être un processus exigeant, mais il faut le faire. Le stress serait considérable s’il n’y avait personne pour aider et s’il n’y avait rien (c’est-à-dire aucune documentation) à laquelle se référer.

Au fil du temps, les organisations qui se développent, mais qui maintiennent la tradition orale, risquent de se désorganiser et de devenir inefficaces. Elles peuvent cependant prétendre qu’elles conservent la « pureté originelle » de leur organisation et s’accrochent au « facteur plaisir » qui permet aux gens de se rencontrer et de parler beaucoup entre eux.

En fin de compte, le bon moment pour renoncer à la tradition orale est celui où il y a plus de personnes que le temps disponible pour partager rigoureusement les connaissances. Il faut le faire avant que les gens cachent leur mécontentement et lancent leurs propres pratiques créatives non alignées avec la politique interne.